L'Hôtel Dieu au XVIe siècle

 

        C'est en 1519 que se déroule l'action relatée dans l'Enigme du Manuscrit de Pommard. A ce titre, j'ai dû effectuer de nombreuses recherches sur l'aspect, l'organisation et le rayonnements - forcément fort différents de nos jours - de l'Hôtel Dieu de Beaune. Afin d'éviter autant que possible less erreurs ou imprécisions historiques, j'ai élargi mon étude à toute la ville de Beaune, à l'histoire de la Bourgogne et aux influences politiques de l'époque considérée. N'étant pas historien de formation, la chose n'a pas toujours été simple, mais la passion de l'écriture, la volonté de conter une histoire plausible et l'amour de la Bourgogne m'ont permis de parvenir à mes fins (du moins, je l'espère). Vous trouverez donc ci-dessous quelques uns des documents qui m'ont permis de retranscrire sur le papier l'ambiance qui régnait à l'hôtel Dieu de Beaune aux alentours du mois de septembre 1519.

 

 

 

 

 

 

 

 

     Bienvenue à l'Hôpital de Beaune... Nous sommes en septembre 1519 et, comme chaque matin, une agitation fébrile est palpable dans la Cour d'Honneur et dans les salles où les malades viennent de passer la nuit avec plus ou moins de bonheur et de souffrance. C'est l'heure des soins, des visites ou de l'évacuation de ceux qui n'ont pas survécu à la nuit. Sur la place du Marché au blé attenante (à gauche sur la photo), les agriculteurs de la région commencent à installer poulets, orge, chapons ou blé sur leurs étales. En 1519 (soit un peu plus de 70 ans après sa création), l'Hôpital de Beaune est une véritable petite ville dans la ville avec sa hiérarchie, ses rites et ses luttes d'influence.

     Cette maquette (conçue à l'occasion de l'exposition "La splendeur des Rolin" réalisée il y a quelques années à Beaune et Autun) a été d'une valeur inestimable pour moi. Elle m'a, en effet, permis de visualiser l'aspect de la bâtisse de l'époque avec bien plus de facilité que s'il s'était agi d'un texte (je tiens d'ailleurs à remercier le créateur de cette maquette qui a dû compulser de nombreux documents pour arriver à ce résultat - s'il veut bien me contacter, ce serait un plaisir de le connaître...). Les principaux points à noter sont :

     - l'absence de la salle Saint Louis sur le côté nord-ouest de la Cour d'Honneur. Cette salle sera construite au XVIIIe siècle afin de limiter la vulnérabilité de l'Hôpital (en fermant le carré, on parvient mieux à se protéger contre les intrusions).

     - la présence, à la place de la salle Saint-Louis, d'une grange dans laquelle sont stockés du fourage et des outils. On aperçoit également un pont et un chemin qui longe la Bouzaize (rivière qui traverse la Cour d'Honneur).

     - le grand porche latéral n'existe pas encore. Il n'y avait qu'une simple porte qui donnait sur un jardinet.

     - au pied de la tour carrée se trouvait le lavoir où les soeurs nettoyaient le linge et jetaient les déchets. Un lieu important pour le roman.

  - on peut également noter, au centre de la Cour d'Honneur, la présence d'une croix. Cette dernière disparaîtra au début du XXe siècle (elle existait encore au moment des premières ventes des vins qui se tenaient dans la cour, voir photo ci-contre)

     - à l'arrière de l'Hôpital, un grand bâtiment abrite le couvent des Cordeliers avec sa chapelle et son clocher (aujourd'hui traversé par une rue ; ce qu'il reste du couvent a été transformé en cave à dégustation). Les parties annexes de l'Hôtel Dieu renfermaient également un potager destiné à cultiver des légumes ainsi que de nombreuses plantes médicinales.

     - le jardin qui se trouve à droite du bâtiment de l'hôpital était, selon toute vraisemblance, planté en vigne (chapitre 6 du roman). Il appartenait aux moines Cordeliers. Ainsi, l'Hôpital, propriétaire de nombreuses vignes données par des personnes reconnaissantes pour avoir été guéries ou par piété, était étroitement lié à la vie quotidienne des vendanges et à la vinification.

     - Les imposantes Halles telles que nous les connaissons aujourd'hui n'existaient pas, même si la place (appelée à l'époque Place du Marché au Blé) connaissait une activité commerciale intense.

la façade sur rue, la place du Marché au blé

la Cour d'Honneur

 

     Ci-contre, un plan un peu plus détaillé, réalisé par mes soins, de la Cour d'Honneur. On peut noter la Bouzaize (rivière) qui traverse de part en part la construction. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, personne n'aurait songé puiser de l'eau dans la rivière (les malades buvaient du vin, seule boisson dont on pouvait être à peu près certains qu'elle était potable). Par contre, on se servait de l'eau courante pour laver le linge et rejeter les déchets (urine, excréments...) ce qui avait le don de polluer l'eau jusqu'à Châlon sur Saône. A noter tout de même que le lavoir se situait en amont du puits par lequel on rejetait les déchets !

     Aujourd'hui, le visiteur aura la joie de pouvoir observer le lit de la rivière à travers une vitre en plexiglas aménagée dans le sol de la salle Saint Nicolas.

deux gravures de l'Hôtel Dieu (collection particulière)

     Ci-contre, deux gravures datant du XXe siècle représentant la Cour d'Honneur et le grand porche d'entrée de l'Hôpital.

 

plan détaillé de l'Hôtel Dieu au XVe siècle.

cliquer sur l'image pour l'agrandir

timbre édité à l'occasion du 500e anniversaire de la création de l'Hôtel Dieu (1943)

 

deux hospitalières sur la galerie haute

 

pose devant le puits en tenue d'hiver ou d'été

(probablement début du XXe siècle)

 

     Comme dans tout ordre religieux, la vie quotidienne des soeurs Hospitalières était cadencée par les heures de prière. Les premières religieuses arrivèrent à Beaune début janvier 1443, en provenance d'un couvent du nord de la France (Valenciennes). L'Hôpital ne fit que grandir et prospérer en échappant à l'influence des ordres religieux de la région dont le souhait a toujours consisté à vouloir s'emparer de l'administration de l'Hôtel Dieu. Fort heureusement, jusqu'à la Révolution Française, de nombreuses bulles papales et décrets royaux ont permis à l'institution de garder son autonomie vis-à-vis des autres ordres religieux. D'ailleurs, jusqu'à 1789, la direction de l'Hôpital n'échappa jamais aux descendants de Nicolas Rolin.

      Quelques images des vêtements portés par les soeurs Hospitalières de l'Hôtel Dieu. Elles disposaient de deux tenues, une pour l'hiver et une autre pour l'été. Quelques variantes étaient possibles en fonction du rang occupé et du rôle au sein de la confrérie (médecin, intendante, supérieure, apothicaire...)

      La hiérarchie était extrêmement importante au sein de l'Hôtel Dieu. Elle permettait d'assurer une répartition des tâches et le bon fonctionnement des institutions. L'Hôtel Dieu est longtemps resté sous l'autorité suprême du Pape qui seul décidait de son niveau d'autonomie (en fait, le pape se moquait certainement pas mal de ce qui se passait à Beaune et laissait entière liberté de gestion aux descendants Rolin). Le Patron Temporel (ou directeur) était celui qui s'occupait de toute la partie administrative. Ce rôle échut, jusqu'à la Révolution de 1789 à un descendant direct de Nicolas Rolin (en 1519, Loys Rolin). L'aspect médical de l'Hôtel Dieu était, quant à lui, géré par la Mère Supérieure (ou maîtresse). Elle disposait de pouvoirs assez étendus (en 1519, Marie Marchandot occupait ce poste). Quant à l'aspect religieux, il était assuré par un Père Spirituel chargé des messes, des enterrements et, plus généralement, de toutes les cérémonies. Peu d'hommes avaient le droit de pénétrer dans l'enceinte de l'Hôpital (sauf malade, évidemment...)

Le remède miracle : la thériaque. La composition de cette préparation n'est pas totalement élucidée. Ce que l'on sait, c'est que chaque malade entrant à l'Hôtel Dieu, quelle que soit sa pathologie, devait avaler de la thériaque. Ses vertus, certainement antiséptiques et/ou calmantes permettaient d'améliorer l'état de nombreux patients.

      L'un des joyaux de l'Hôtel Dieu de Beaune est, sans doute, son apothicairerie. Disposant de nombreux plats en étain et pots en porcelaine, sa visite vaut vraiment le détour. Un jardin, situé derrière la Cour d'Honneur, permettait de cultiver certaines plantes. Celles que l'on ne pouvait entretenir à Beaune étaient achetées à des marchands. L'art des décoctions était très développé au XVIe siècle et certaines recettes sont encore appliquées de nos jours.

un livre incontournable : la Splendeur des Rolin

Editions PICARD - 2000

description de l'Hôtel Dieu actuel et passé

Collectif - Editions SOMOGY - 2005

 

 

     De nombreux ouvrages sont disponibles à la librairie de l'Hôtel Dieu ou à l'Athenaeum (librairie située en face de l'Hôtel Dieu)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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